Jour 4, mercredi 17 août 2016: L'enfer blanc.




La nuit fut parfaite. Réveil classique puis ascension rapide des quelques 150m de dénivelé qui nous séparent de la redoute de Lindus qui étale ses anciennes fortifications napoléoniennes à 1221 mètres d'altitude. On est ici à une paire de kilomètres du célèbre col de Roncevaux/Ibaneta où dans un passé ancien, l'armée de Charlemagne subit une défaite cuisante. Après avoir razzié Pampelune, elle fut attaquée par les Wascons. Roland armé de son célèbre cor y laissa la vie.




Panorama magnifique, belle brume qui couvre la plaine mais laisse libre la ligne de crête frontière. On suivra celle-ci sans encombres, suivant une piste de pèlerinage, "artillant" kilomètre après kilomètre, jusqu’au parking au pied de la tour d’Urkulu.  On parvient même à joindre une chambre d’hôte sur Lescun, qui accepte d’aller chercher nos colis à la poste et nous autorise donc notre jour de retard sur le planning initial. Parfait.
Trop, sans doute. La journée ne pouvait pas se dérouler sans accroches. Pour rejoindre le col d’Erozaté, il va nous falloir traverser un épais brouillard. Deux choix s’offrent à nous : Traverser dans l’axe, par les cabanes d’Elhursaro, où contourner le cirque par le sud. On se lance dans le contournement. Grave erreur. Il n’existe pas de sentier, on chemine difficilement à flanc de montagne, dans des herbes trempées par la bruine qui nous montent jusqu’aux cuisses. En une demi-heure, on est dans le même état que si on avait plongé dans une piscine. Qui plus est, on doit faire très attention à ne pas glisser ; la pente étant très engagée,  la chute pourrait ici être fatale. On ne voit pas où on met les pieds, et Antoine, lors de l’une de ses nombreuses chutes, brisera l’un de ses deux bâtons. Seule bonne surprise, la rencontre inattendue avec 3 superbes rapaces qui ne semblaient pas motivés pour pratiquer du PSV dans ces conditions.
Au bout de deux heures, on abandonne. On est totalement perdu, et le cirque semble sans fin. On rebrousse chemin, et c’est en suivant la montre GPS qu’on trouvera, tant bien que mal, les cabanes d’Elhursaro. On s’y arrête manger, à l’extérieur, gelé, trempé, mais la faim est trop grande.

Dans la mesure où l’on ne récupère pas du tout, la pause a été de courte durée. On remonte cette fois sur le versant opposé, manquant de peu de rater le sentier dissimulé sous les herbes qui remonte au col d’Erozaté. Ici, la chute est interdite, malgré les herbes et nos semelles trempées. Antoine perd à plusieurs reprises l’équilibre, mais parvient à chaque fois à se rétablir. De nous deux, je suis certainement celui qui a le plus peur à chaque fois que ça se produit (c’est-à-dire aux alentours de 10 fois par jours), et c’est seulement une fois arrivé à Font Romeu que j’aurai appris à ne plus y faire attention, puisque d’expérience, un Jourquin retombe toujours sur ses pattes.

Une fois au col, la météo qu’on espérait meilleure ne se dégage pas. Au moins, on retrouve une piste que le GR (et nous, par la même occasion) allons suivre pour le restant de la journée. A partir de là, on peut recommencer à « artiller » des kilomètres. Mais le moral a pris un coup : toute cette escapade, non contente de nous avoir gelée jusqu’aux os et trempée tout notre matériel, nous a fait prendre quelques 5 bonnes heures de retard.


          Pour rester éveillés et ne pas trop y penser, on se posera des énigmes à tour de rôle pendant quelques heures… Jusqu’à ce qu’on décide de s’arrêter. Sans être tout à fait perdu (Puisqu’on suit toujours le bon GR), on ne sait tout de même pas trop où l’on est. On essaye de trouver un endroit à peu près plat, qu’on dégage tant bien que mal du tapis de crottes de mouton omniprésentes, et on monte notre tente sous la pluie. On se déshabille, on enfile quelques affaires sèches, on dîne et on essaie de dormir dans cette humidité ambiante, priant pour que les conditions s’améliorent dans la nuit…




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